Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/576

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sans que ma mère pût se décider à ce qu’on désirait d’elle. Ma grand’mère voulait que mon éducation lui fût entièrement confiée et que je ne la quittasse plus. Ma mère ne pouvait abandonner Caroline, qui était en pension, à la vérité, mais qui bientôt devait avoir besoin qu’elle s’en occupât d’une manière suivie, et elle ne pouvait se résoudre à se séparer définitivement de l’une ou de l’autre de ses filles. Mon oncle de Beaumont vint passer un été à Nohant pour aider ma mère à prendre cette résolution qu’il jugeait nécessaire au bonheur de ma grand’mère et au mien, car, tous comptes faits, et même ma grand’mère augmentant le plus possible l’existence à laquelle ma mère pouvait prétendre, il ne restait à celle-ci que 2,500 francs de rente, et ce n’était pas de quoi donner une brillante éducation à ses deux enfans. Ma grand’mère s’attachait à moi chaque jour davantage, non pas à cause de mon petit caractère, qui était encore passablement quinteux à cette époque, mais à cause de ma ressemblance frappante avec mon père. Ma voix, mes traits, mes manières, mes goûts, tout en moi lui rappelait son fils enfant, à tel point qu’elle se faisait quelquefois en me regardant jouer, une sorte d’illusion, et que souvent elle m’appelait Maurice, et disait mon fils, en parlant de moi.

Elle tenait beaucoup à développer mon intelligence, dont elle se faisait une haute idée,