Aller au contenu

Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/177

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ma chambre pour me dire encore adieu et me renouveler ses engagemens ; mais je craignis qu’elle ne voulût m’éveiller si elle me supposait endormie, et je ne me couchai pas ; c’est-à-dire que je me relevai aussitôt que Rose fut partie, car lorsqu’elle m’avait mise au lit, elle redescendait attendre auprès de Julie le coucher de ma grand’mère. Ce coucher était fort long. Ma grand’mère mangeait un peu et très lentement ; et puis, pendant qu’on lui apprêtait et lui arrangeait, sur la tête et sur les épaules, une douzaine de petits bonnets et de petits fichus de toile, de soie, de laine et d’ouate, elle écoutait le rapport de Julie sur les choses intimes de la famille, et celui de Rose sur les détails du ménage. Cela durait jusqu’à deux heures du matin, et c’est alors seulement que Rose venait se coucher dans le cabinet contigu à ma chambrette.

Cette chambrette donnait sur un long corridor presque en face de la porte du cabinet de toilette de ma mère, par lequel elle passait ordinairement pour rentrer chez elle, et je ne pouvais manquer de la saisir au passage et de m’entretenir encore avec elle avant que Rose vînt nous interrompre. Mais nous pouvions être surveillées par exception cette nuit-là, et, dans ma terreur de ne pouvoir plus m’épancher avec l’objet de mon amour, je voulus lui écrire une longue lettre. Je fis des prodiges d’adresse et de patience pour rallumer ma bougie, sans allumettes, à mon feu