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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/321

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d’orner et de rehausser mon être intellectuel, croyant que mon être moral y gagnerait. Mais mon idéal était voilé, et je ne comprenais plus l’avenir que je m’étais pendant si longtemps créé et arrangé selon ma fantaisie. J’entrevoyais désormais, dans cet avenir, des luttes contre l’opinion auxquelles je n’avais jamais songé, et je ne sais quelle énigme douloureuse dont on n’avait pas voulu me dire le mot. On m’avait parlé de dangers affreux, on s’était imaginé que je les devinerais, et moi, simple, et d’organisation tranquille, je ne devinais rien du tout. En outre, autant j’ai l’esprit actif pour ce qui sourit à mes instincts, autant je l’ai paresseux pour ce qui leur est hostile, et je ne cherchais pas le mot du sphynx ; mais il y avait quelque chose de terrible devant moi si je persistais à quitter l’aile de ma grand’mère, et ce quelque chose, sans me faire peur, ôtait à mes châteaux en Espagne le charme de la confiance absolue.

« Ce sera pire que la misère, m’avait-on dit, ce sera la honte ! »

« La honte de quoi ? me disais-je. Rougirai-je d’être la fille de ma mère ? Oh ! si ce n’était que cela ! on sait bien que je n’aurai pas cette lâche honte. » Je supposais alors, sans rien incriminer, quelque lieu mystérieux entre ma mère et quelqu’un qui me ferait sentir une domination injuste et illégitime. Et puis je m’abstenais volontairement d’y songer. « Nous