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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/509

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pas, et j’arrivai auprès de l’évêque aussi tranquille que je le suis maintenant. Il me confia à des dames pieuses qui m’envoyèrent ici, parce qu’elles craignaient que mon père ne vînt me reprendre de force si on me laissait dans mon pays. Voilà mon histoire. Elle n’est pas bien longue, ni bien dite, mais je ne sais pas m’expliquer mieux. »

Cette histoire simple et terrible acheva de me monter la tête pour la religion et m’inspira tout à coup pour la sœur Hélène une prédilection enthousiaste. Je vis en elle une sainte des anciens jours, rude, ignorante des délicatesses de la vie et des compromis de cœur avec la conscience, une fanatique ardente et calme comme Jeanne d’Arc ou sainte Géneviève. C’était, par le fait, une mystique, la seule, je crois, qu’il y eût dans la communauté : aussi n’était-elle pas Anglaise.

Frappée comme d’un contact électrique, je lui pris les mains et m’écriai : « Vous êtes plus forte dans votre simplicité que tous les docteurs du monde, et je crois que vous me montrez, sans y songer, le chemin que j’ai à suivre. Je serai religieuse ! — Tant mieux ! me dit-elle avec la confiance et la droiture d’un enfant : vous serez sœur converse avec moi, et nous travaillerons ensemble. »

Il me sembla que le ciel me parlait par la bouche de cette inspirée.