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Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/641

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détails personnels de cette étrange éducation, et j’en résumerai le résultat par époques successives.

Je lisais, dans les premiers temps, avec l’audace de conviction que m’avait suggérée mon bon abbé. Armée de toutes pièces, je me défendais aussi vaillament qu’il était permis à mon ignorance. Et puis, n’ayant pas de plan, entremêlant dans mes lectures les croyans et les opposans, je trouvais dans les premiers le moyen de répondre aux derniers. La métaphysique ne m’embarrassait guère, je la comprenais fort peu, en ce sens qu’elle ne concluait jamais rien pour moi. Quand j’avais plié mon entendement, docile comme la jeunesse, à suivre les abstractions, je ne trouvais que vide ou incertitude dans les conséquences. Mon esprit était et a toujours été trop vulgaire et trop peu porté aux recherches scientifiques pour avoir besoin de demander à Dieu l’initiation de mon âme aux grands mystères. J’étais un être de sentiment, et le sentiment seul tranchait sur moi les questions à mon usage, qui toute expérience faite, devinrent bientôt les seules questions à ma portée.

Je saluai donc respectueusement les métaphysiciens ; et tout ce que je peux dire à ma louange, à propos d’eux, c’est que je m’abstins de regarder comme vaine et ridicule une science qui fatiguait trop mes facultés. Je n’ai pas à me reprocher d’avoir dit alors : « À quoi bon la métaphysique ? » J’ai été un peu plus superbe quand, plus tard,