Aller au contenu

Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 5a9 1855 Gerhard.djvu/723

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

du sang et des nerfs ; vous les préviendrez, tout au moins, par le régime moral et physique. »

Je donnai pleinement raison, cette fois, à Deschartres : pourtant il me revint plus tard bien des doutes et des angoisses de l’âme à ce sujet. Je pensai que le libre arbitre existe dans la pensée saine, mais que son exercice peut être entravé par des circonstances tout à fait indépendantes de nous et vainement combattues par notre volonté. Ce n’était pas ma faute si j’avais la tentation de mourir. Il se peut que j’eusse aidé à ce mal par un régime trop excitant au moral et au physique ; mais, en somme, j’avais manqué de direction et de repos ; ma maladie était la conséquence inévitable de celle de ma grand’mère.

Depuis mon immersion dans la rivière, je me sentis débarrassée de l’obsession de la noyade ; mais, malgré les soins médicaux et intellectuels de Deschartres, l’attrait du suicide persista sous d’autres formes. Tantôt j’avais une étrange émotion en maniant des armes et en chargeant des pistolets, tantôt les fioles de laudanum que je touchais sans cesse pour préparer des lotions à ma grand’mère me donnaient de nouveaux vertiges.

Je ne me souviens pas trop comment je me débarrassai de cette manie. Cela vint de soi-même avec un peu plus de repos que je donnai à mon esprit, et que Deschartres vint à bout d’assurer à mon sommeil, en se dévouant plus d’une fois