Page:Sand - Isidora, 1845.djvu/158

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lien honteux, une maîtresse fidèle, éprouvée par trois ans d’absence et libre de se donner après un combat de trois ans contre les hommes et contre lui-même… Oh ! Jacques, c’est ainsi que je t’ai aimé, et je reviens ici, je me berce depuis vingt-quatre heures des plus doux rêves. Je caresse mille projets, je m’endors dans les délices de mon imagination en attendant que je fasse des démarches pour te chercher et te retrouver ; et tout à coup le roman infernal de ma destinée s’accomplit : tu parais devant moi, tu sembles sortir de terre, juste à l’endroit où je t’ai vu pour la première fois ! Je t’enlève, je t’entraîne ici, parmi ces fleurs, où pour la première fois tu m’as parlé… Nous sommes seuls… je suis encore belle… je t’aime avec passion… et toi tu ne m’aimes plus ! Oh ! c’est horrible, et voilà toute ma vie expiée dans ce seul instant !

La pâle traduction que nous venons de donner des paroles d’Isidora ne saurait donner une idée de son éloquence naturelle. Ce don de la parole, quelques femmes, même les femmes vulgaires en apparence, le possèdent à un degré remarquable et l’exercent jusque sur des sujets frivoles. La profession d’avocat conviendrait merveilleusement à certaines femmes du peuple que vous avez dû rencontrer aussi bien