Page:Sand - Jean Ziska, 1867.djvu/320

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

GABRIEL.

Décidément, c’est le mauvais présage. Qu’il s’accomplisse, ô mon Dieu ! Je sais que, pour moi, il n’est plus de malheur possible.

GIGLIO, se rapprochant encore.

Le diable de chien ! Heureusement il ne paraît pas y faire attention… Par le diable ! c’est si facile, que je n’ai pas le courage !… Si je n’avais pas femme et enfants, j’en resterais là !

GABRIEL.

Cependant avec la liberté… (et ma démarche auprès du pape doit me mettre à l’abri de tout), la solitude pourrait être belle encore. Que de poésie dans la contemplation de ces astres dont mon désir prend possession librement, sans qu’aucune vile passion l’enchaîne aux choses de la terre ! Ô liberté de l’âme ! qui peut t’aliéner sans folie ? (Étendant les bras vers le ciel.) Rends-moi cette liberté, mon Dieu ! mon âme se dilate rien qu’à prononcer ce mot : liberté !…

GIGLIO, le frappant d’un coup de poignard.

Droit au cœur, c’est fait !

GABRIEL.

C’est bien frappé, mon maître. Je demandais la liberté, et tu me l’as donnée. (Il tombe, Mosca remplit l’air de ses hurlements.)

GIGLIO.

Le voilà mort ! Te tairas-tu, maudite bête ? (Il veut le prendre, Mosca s’enfuit en aboyant.) Il m’échappe ! Hâtons-nous d’achever la besogne. (Il s’approche de Gabriel, et essaie de le soulever.) Ah ! courage de lièvre ! Je tremble comme une feuille ! Je n’étais pas fait pour ce métier-là.

GABRIEL.

Tu veux me jeter dans le Tibre ? Ce n’est pas la peine.