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jean ziska.

pas, n’en forme qu’une non plus, quoi qu’en puissent dire les érudits qui ont voulu faire de si grandes distinctions entre elles[1]. C’est l’histoire du Joannisme, c’est-à-dire l’interprétation et l’application de l’Évangile fraternel et égalitaire de saint Jean. C’est la doctrine de l’Évangile éternelle ou de la religion du Saint-Esprit, qui remplit tout le moyen âge et qui est la clef de toutes ses convulsions, de tous ses mystères. Trouvez-moi une autre clef pour ouvrir tous les problèmes du temps présent, sinon permettez-moi de commencer mon récit ; car il ressemble beaucoup jusqu’ici à celui du caporal Trimm, qui s’appelait précisément l’Histoire des sept châteaux du roi de Bohême.


II.


Nous avons justement laissé le roi de Bohême, Wenceslas l’ivrogne, dans un de ses châteaux (c’était je crois, celui de Tocznik), tandis que Jean Huss, le jeune recteur de l’université de Prague, traduisait en bohémien les livres de Wicklef, et prêchait le wickléfisme. Le wickléfisme était une des nombreuses formes qu’avait prises la doctrine de l’Évangile éternel, la grande hérésie lancée dans le monde depuis plusieurs siècles, et formulée par l’abbé Joachim de Flore, en 1250. Wicklef était mort, mais le wickléfisme survivait à son apôtre, et les adeptes, sous le nom de Lollards, préparaient une grande insurrection, se fiant peut-être aux relations, et l’on dit même aux engagements que, soit curiosité, soit enthousiasme, Henri V avait contractés avec eux dans les années ora-

  1. Les rivalités et les inimitiés de ces sectes entre elles ne prouvent qu’une vérité banale ; c’est qu’il est fort difficile de s’entendre sur les moyens de réaliser une grande entreprise ; mais le même but, la même idée est au fond de toutes.