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jean ziska.

fusé jusque-là d’adhérer au hussitisme. Il courut à Prague embrasser la doctrine. Tel devait être l’effet des violences de Sigismond. L’empereur se retira, après avoir fait tout le mal possible au pays, où il exerça des cruautés pires que toutes celles de Ziska. Celui-ci épargnait du moins, autant que possible, les femmes et les enfants, et recevait à merci tous ceux qui se rendaient sincèrement. Sigismond n’épargnait rien, et, dans sa rage aveugle, immolait ensemble amis et ennemis. Les Orébites firent peser sur les couvents d’horribles représailles. Ceux des moines qu’ils ne brûlaient pas, ils les laissaient enchaînés sur la glace, pour les faire périr de froid.

Après leur victoire, les Praguois, n’ayant plus rien que de funeste à attendre de la part de Sigismond, assemblèrent les principaux seigneurs, afin d’élire un autre roi, et ceux-ci se déclarèrent pour Jagellon, roi de Pologne, chrétien de fraîche date, qui semblait ne devoir pas les inquiéter dans leur religion. Mais les Orébites et les Tabordes repoussèrent vivement cette proposition. A peine avons-nous chassé un roi étranger, disait Nicolas de Hussinetz (l’intrépide associé de Ziska) que vous en demandez un second. Indigné de leur dessein, il fit sortir de Prague tous ses Taborites, et s’en alla avec eux assiéger et battre les villes impériales de l’intérieur.

Cependant il rentra peu après dans la capitale avec des intentions énergiques. Les Orebites n’étaient pas moins mécontents que lui du juste milieu hussite. À peine le danger était-il passé, que les Calixtins, mécontents de la vie austère qu’entraînait pour eux le système dévastateur de Jean Ziska, oubliaient qu’ils devaient leur salut à sa science militaire, à sa bravoure, et à l’élan irrésistible de ses fougueux disciples. Ils affectaient alors une grande horreur pour les cruautés commises envers les moines, et cette compassion, qui eût honoré des âmes sincères,