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PRÉFACE


Oui, mon cher et gracieux docteur, faire un journal, c’est renoncer à l’avenir. C’est vivre dans le présent, c’est avouer à l’implacable, qu’on n’attend plus rien de lui, qu’on s’accommode de chaque jour et qu’il n’y a plus de relation entre ce jour-là et les autres. C’est boire son océan goutte à goutte, par crainte de le traverser à la nage. C’est compter les feuilles de l’arbre dont le tronc ne reverdira plus.

On ne fait un journal que quand les passions sont éteintes, ou qu’elles sont arrivées à l’état de pétrification qui permet de les explorer comme des montagnes d’où l’avalanche ne se détachera plus. Ce travail constate un état de solidité effrayante et que je ne souhaite à personne,