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la petite fadette

de tout perdre et de tout quitter à la fois lui fit tant de peine qu’il ne pouvait plus s’arrêter dans ses larmes.

Landry pleurait aussi, mais pas autant, et pas de la même manière ; car il pensait toujours à prendre pour lui le plus gros de la peine, et il voulait voir ce que son frère en pouvait supporter, afin de lui épargnera tout le reste. Il connut bien que Sylvinet avait plus peur que lui d’aller habiter un endroit étranger et de se donner à une famille autre que la sienne.

— Tiens, frère, lui dit-il, si nous pouvons nous décider à la séparation, mieux vaut que je m’en aille. Tu sais bien que je suis un peu plus fort que toi et que, quand nous sommes malades, ce qui arrive presque toujours en même temps, la fièvre se met plus fort après toi qu’après moi. On dit que nous mourrons peut-être si l’on nous sépare. Moi je ne crois pas que je mourrai ; mais je ne répondrais pas de toi, et c’est pour cela que j’aime mieux te savoir avec notre mère, qui te consolera et te soignera. De fait, si l’on fait chez nous une différence entre nous deux, ce qui ne paraît guère, je crois bien que c’est toi qui es le plus