Page:Sand - Le Péché de Monsieur Antoine, Pauline, L’Orco, Calman-Lévy, 18xx, tome 1.djvu/302

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— Et si l’on m’accepte ?

— Tant mieux pour vous !

— C’est selon, Monsieur, jusqu’où auront été les choses entre elle et votre fils.

— Il faudrait que vous fussiez bien simple pour ne pas avoir le temps et l’adresse de savoir à quoi vous en tenir, puisque vous allez là en observateur.

— Et si je m’aperçois que j’arrive trop tard ?

— Vous vous retirerez.

— J’aurai fait là une drôle de campagne, et M. Émile m’en voudra.

— Galuchet, je ne demande rien pour rien. Certes, tout cela ne se fera pas sans quelque ennui et quelque désagrément pour vous ; mais il y a une bonne gratification au bout de tous les sacrifices que je vous demande.

— Ça suffit, Monsieur, et je n’ai plus qu’un mot à dire : c’est que, dans le cas où la fille me conviendrait, et si je venais à lui convenir aussi, je serais trop pauvre, à l’heure qu’il est, pour entrer en ménage.

— Nous avons déjà prévu ce cas. Je vous aiderais à vous faire une position. Par exemple, vous vous engageriez à me servir pendant un temps donné, et je vous ferais une avance de cinq mille francs sur vos honoraires, plus un don de cinq mille francs, si c’était nécessaire.

— Ce n’est plus une plaisanterie, une supposition, ça ? dit Galuchet en se grattant la tête plus fort que jamais.

— Je ne plaisante pas souvent, vous devez le savoir, et cette fois-ci je ne plaisante plus du tout.

— C’est entendu, Monsieur ; vous avez trop d’honnêtetés pour moi. Je vas me planter en faction à côté de M. Émile, et il sera bien fin si je le perds de vue ! »

« Il sera plus fin que toi, et ce ne sera pas difficile, pensa M. Cardonnet dès que Galuchet se fut retiré, mais il suffira qu’il ait un rival de ton espèce pour se sentir