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Page:Sand - Lettres d un voyageur.djvu/356

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la Charte constitutionnelle. Je pensais que le public s’occuperait si peu de mon individu qu’il ne viendrait à l’esprit de personne d’incriminer l’emploi des mots et d’exercer sur la vie d’un pauvre poëte, jusqu’au fond de sa mansarde, une sorte d’inquisition pour le forcer à justifier ses actions, ses pensées et ses croyances, à décliner le sens exact d’expressions plus ou moins vagues, mais toujours placées peut-être de manière à s’expliquer de soi-même. Il est possible que le public n’ait pas eu en cela un rôle bien grave, et que la partie virile, soi-disant outragée, se soit livrée à un peu de commérage puéril sur un sujet peu digne d’un si triste honneur. Mais ce qu’il y a de certain, c’est que j’ai eu tort de n’être pas parfaitement clair, précis, logique et correct. Hélas ! monsieur, je me reproche tous les jours un tort bien grave, c’est de n’être ni Bossuet ni Montesquieu ; mais je n’ai pas trop l’espoir de m’en corriger, je vous le confesse.

Un autre reproche sérieux que vous m’adressez est celui-ci : « Il serait peut-être plus héroïque, à qui n’a pas eu le bon lot, de ne pas scandaliser le monde avec son malheur en faisant d’un cas privé une question sociale, » etc.

Tout ce paragraphe est noblement pensé et noblement écrit. Ce n’est pas le sentiment exprimé là qui me trouvera rebelle. Je mets la patience et l’abnégation au-dessus de tout, et je ne réponds rien à ce qui peut me concerner personnellement dans ce reproche. Si j’écrivais à un prêtre, peut-être le récit d’une confession générale entraînerait-il victorieusement l’absolution en même temps que la réprimande et la pénitence. Mais il n’y a encore eu que Jean-Jacques qui ait eu le droit de se confesser en public. Je répondrai donc d’une manière générale.

Il me semble qu’il y a beaucoup de prétention à la patience et à l’abnégation dans le monde. Il me semble (je ne sais si je me trompe) que nous ne vivons pas dans un siècle d’indépendance et d’orgueil illimité ; je ne vois pas que les