Page:Sand - Malgretout.djvu/127

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récria sur la solitude où je tombais. Toute la famille était effectivement au concert ; ils étaient partis dès le matin et ne rentreraient que le soir. Je répondis que j’avais prévu cela et que je venais réclamer l’hospitalité de cette bonne femme, c’est-à-dire un verre de lait pour ma fillette et la liberté de me promener seule avec elle dans le jardin et les prés environnants.

Je passai donc là une heure paisible dans un endroit charmant, car tous ces villages, situés à un quart d’heure de trajet de locomotive les uns des autres, sur le bord de la Meuse ou sur la croupe des rochers qui la dominent, occupent des sites admirables. Le temps était chaud, et les jardins, encore pleins de fleurs, avaient l’air de se croire au printemps. L’automne n’avait pas encore jauni les arbres, et j’avoue que je ne m’en plaignais pas. Je n’aime pas ces tons diaprés que l’on vante trop, et qui, par des effets souvent criards, détruisent l’harmonie de la verdure ou troublent les notions de la perspective. Tout était riant et pur ; Sarah jouait avec plaisir dans un lieu nouveau. Ma tristesse se dissipait toujours quand je voyais rire et gambader la chère petite créature. Je m’applaudissais de mon courage. Le cœur me battait bien encore en songeant qu’à cette heure Abel, voyant mon père et ma sœur dans une avant-scène, me croirait indifférente à son succès ou repentante de ma promesse ; mais, s’il se souvenait d’avoir dit :