Page:Sand - Malgretout.djvu/230

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aussi discrète, aussi ferme. Vous ne m’aimerez peut-être pas ; vous avez trop de préjugés sur les choses de sentiment pour me comprendre. Un jour, vous me rendrez justice, et vous me serez aveuglément dévouée. Vous aurez besoin de moi. Vous n’en croyez rien ? Vous verrez ! Vous me trouverez alors, et vous direz : « Elle est bonne parce qu’elle est grande. » Adieu donc, miss Owen, faites de mes confidences l’usage que vous voudrez. Moi, comme j’ai gardé pour moi votre secret, je le garderai encore.

— Vous l’avez gardé vis-à-vis de mon père et de ma sœur ?

— C’est surtout vis-à-vis de votre sœur que je l’ai gardé. Où en seriez-vous, pauvre enfant, si Adda savait combien Abel a été épris de vous ?

— Qu’importe à ma sœur ?…

— Votre sœur aime Abel, ne le savez-vous pas ?

— Vous rêvez, mademoiselle d’Ortosa ! Elle le dédaigne profondément.

— C’est pour cela qu’elle en est folle. Quand on donne accès à une fantaisie dont on rougit, cela devient une passion.

— Laissez-moi, m’écriai-je en quittant son bras, c’est vous qui prenez plaisir à m’étonner et à m’affliger par un tissu d’extravagances !

— Vous voilà blessée au cœur, pauvre fille, et vous devenez très-irritable ! Allons, calmez-vous. Bientôt vous verrez votre sœur, et, pour peu que vous ayez de pénétration, vous reconnaîtrez que je