Page:Sand - Malgretout.djvu/274

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

quittais presque pas l’enfant, qui était nerveuse et qui s’était reprise pour moi d’une passion dont sa mère recommençait à être jalouse. Enfin un soir je pus prendre le thé avec mon père et Adda, et, en les questionnant sur tout ce qui les avait intéressés dans leur voyage, je pus leur parler de mademoiselle d’Ortosa et leur dire quelques mots de la visite qu’elle m’avait faite, de leur part pour ainsi dire. J’espérais qu’à propos d’elle Adda me parlerait d’Abel. Je ne me trompais pas. Mon père fit d’abord en souriant l’éloge du grand air et des grands succès de mademoiselle d’Ortosa dans le monde, mais il ajouta :

— Je suis bien sûr, Sarah, qu’elle ne vous a pas plu autant qu’à votre sœur, qui s’en est affolée à la légère.

Adda s’écria que mon père était injuste, vu qu’il pensait du mal d’une personne dont il n’y avait à dire que du bien, et, comme je hasardais quelques objections, elle prit feu, et fit de la belle Espagnole un éloge enthousiaste qui me surprit beaucoup. Abel s’était-il complètement trompé sur les sentiments qu’il leur attribuait l’une pour l’autre ?

Enfin le nom d’Abel vint naturellement dans la conversation.

— Mademoiselle d’Ortosa tourne toutes les têtes, dit Adda, et vous subirez son ascendant comme les autres, ma chère sœur ! Tenez ! un de vos grands amis, M. Abel, que nous avons vu souvent le mois dernier, a essayé d’échapper à la