Page:Sand - Malgretout.djvu/302

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pour faire accepter ses vaines dépenses comme la gloire et la fortune du pays ; c’est le préjugé du pauvre de croire que le luxe le nourrit. Il ne s’est jamais rendu compte de ce qu’il lui coûte.

Lady Hosborn dormait là-dessus du sommeil du juste, aidé de son néant intellectuel ; elle était aux aguets des personnes intéressantes à recruter pour animer et embellir ses salons, et, du moment qu’elle vit s’éteindre l’astre de mademoiselle d’Ortosa, elle jeta les yeux sur ma sœur. Elle vint la chercher, l’enlever, disait-elle, et, comme elle était une personne dont la jeunesse n’avait jamais donné prise à la calomnie, — elle était d’une laideur à donner le cauchemar, — nous ne pouvions, ajoutait-elle, la lui refuser. Nous ne le pouvions pas en effet. Adda était décidée, et nous n’avions plus d’influence sur elle. Il ne nous restait qu’à paraître céder de bonne grâce, et, pour qu’elle n’eût pas l’air de débuter dans ce monde-là par un coup de tête, nous résolûmes de l’accompagner, mon père et moi, pour l’aider à y faire décemment son entrée.

Elle partit munie de ses plus étourdissantes toilettes, jetant le deuil aux orties un peu plus tôt qu’il ne fallait. J’avais pour toute garde-robe de luxe une assez belle robe noire que je ne crus pas devoir mettre, afin de n’être pas prise au premier abord pour celle des deux qui était veuve. Je n’avais plus à ma disposition qu’une petite robe grise