Page:Sand - Nouvelles Lettres d un voyageur.djvu/174

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Comme je vous prônerai la sainte sagesse des vieillards et les joies calmes de l’égoïsme ! Que personne ne s’avise plus d’être malheureux dans ce temps-là, car aussitôt je me mettrai à l’ouvrage, et je noircirai trois mains de papier pour lui prouver qu’il est un sot et un lâche, et que, quant à moi, je suis parfaitement heureux[1]. »

Aujourd’hui, en 1868, il y a bien un vieux ermite qui se promène à travers mes romans ; mais il n’a pas de barbe, il n’est pas stoïcien, et certes il n’est pas un philosophe bien profond, car c’est moi. Je ne sais s’il condamnerait et gourmanderait la jeunesse de son temps, si elle était jeune et malheureuse ; mais, chose étrange, cette jeunesse nouvelle rit de tout, elle exorcise le doute au nom de la raison, elle ne comprend rien aux souffrances morales que les vieux ont traversées, elle s’en moque un peu, et un des plus naïfs ; un des plus émus, un des plus jeunes de cette époque de refroidissement, c’est encore le vieux ermite qui la contemple avec surprise.

Le voyageur d’autrefois l’eût maudite, l’époque où nous voici ! Je crois bien qu’il n’eût pas résisté

  1. Lettres d’un voyageur./>