Page:Sand - Nouvelles Lettres d un voyageur.djvu/334

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Tu luttas quarante ans contre un mal sans remède,
Tu naquis condamné, c’est-à-dire béni.
Dieu t’avait dit là-haut : « Au malheur, viens en aide ;
Meurs à la peine : alors, ton temps sera fini ».

Il vécut pour bénir, pour consoler, pour prendre
Sur ses bras, tout le poids des misères d’autrui :
Pour souffrir de nos maux, pour ranimer la cendre
De nos cœurs épuisés que l’espoir avait fui.

Simple dans sa parole, éloquent à son heure,
Ingénieux en l’art de la persuasion,
Habile à pénétrer ce qu’en secret on pleure,
Indulgent aux douleurs de la confession ;

Énergique au besoin, apôtre de tendresse,
Sans parti pris d’orgueil, sans rigueur de savant,
Du véritable juste il avait la sagesse,
Du conseil décisif il avait l’ascendant.

Les esprits froids ont dit : « Cet homme a la manie
De faire des ingrats, puisqu’il fait des heureux ».
Dieu dit : « De la bonté, cet homme eut le génie,
C’est la seule grandeur que je couronne aux cieux »­.