Page:Sand - Nouvelles Lettres d un voyageur.djvu/60

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nous voulons retrouver le groupement gracieux et le riche gazonnement de la nature, il nous faut reproduire avec grand soin le lit naturel où elles naissent, et c’est par hasard que nous y parvenons quelquefois, car presque toujours une petite circonstance absolument indispensable échappe à nos prévisions, et la plante, si rustique et si robuste ailleurs, se montre d’une délicatesse rechigneuse ou d’une nostalgie obstinée.

Voilà pourquoi je préfère aux jardins arrangés et soignés ceux où le sol, riche par lui-même de plantes locales, permet le complet abandon de certaines parties, et je classerais volontiers les végétaux en deux camps, ceux que l’homme altère et transforme pour son usage, et ceux qui viennent spontanément. Rameaux, fleurs, fruits ou légumes, cueillez tant que vous voudrez les premiers. Vous en semez, vous en plantez, ils vous appartiennent : vous suivez l’équilibre naturel, vous créez et détruisez ; — mais n’abîmez pas inutilement les secondes. Elles sont bien plus délicates, plus précieuses pour la science et pour l’art, ces mauvaises herbes, comme les appellent les laboureurs