Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/137

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courbé, à la voix grêle, à l’œil éteint, qui tous les soirs fait dire à un millier de spectateurs : « Où ont-ils péché ce vieux bonhomme qui joue au naturel un octogénaire et qui a encore de la mémoire ? » c’est un garçon de vingt-cinq ans qui a toutes ses dents, tous ses cheveux, qui est frais et dispos, et que sa maîtresse attend dès qu’il aura essuyé ses rides et posé sur un champignon de bois son faux crâne dénudé. Il se redresse, il chante d’une voix mâle en descendant les escaliers quatre à quatre. Son emploi de vieillard lui est léger, et sa gaieté n’en souffre pas. — Auprès de lui, vous avez admiré le contraste de ce beau vainqueur dont l’œil ardent et la voix fraîche expriment la passion ou la galanterie triomphante. Hélas ! il y a quarante ans qu’il est jeune, et ses amantes lui coûtent bien cher, — Cet excellent comique qui vous fait pâmer de rire, c’est un désespéré qui songe au suicide ou qui s’enivre pour s’étourdir. Ce valet de troisième ordre dont l’emploi classique consiste à recevoir des coups de pied dans le dos, c’est un érudit qui fait des études archéologiques très-importantes ou un lettré qui collectionne des ouvrages rares. Cet autre, qui représente les tyrans ou les traîtres, est