Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/231

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

point de faire voûte sur l’eau courante, et une végétation admirable remplissait les marges de l’excavation. Les engrais du jardin maraîcher suintaient probablement dans ses parois, et les pluies y entraînaient, en dépit du mur, le meilleur de son terreau et de ses graines, car les plantes d’ornement s’y mariaient à la flore sauvage, qui avait pris des proportions inusitées. Dans le fond, des arums embaumés, des papyrus élégants, des cotonéastres d’une grâce infinie, embrassaient ou coudoyaient des plantains d’eau, des nénufars, des macres et des alimas, qui s’étaient installés d’eux-mêmes dans une mare limpide, espèce de source ou d’égout de terres posé comme un diamant immobile un peu au-dessus du lit de l’eau courante. Tout cela était extrêmement resserré, mais assez profond, et l’ornementation naturelle s’arrangeait avec tant d’élégance et de luxe, que j’en fus charmé.

— J’appelle ceci mon oubliette, me dit Laurence ; c’est un gouffre de fleurs, de roches, de mousse et d’herbes folles, où je viens oublier le passé quand il me tourmente trop. Je m’abîme dans la contemplation d’une guirlande de roses sauvages ou d’une touffe de graminées, et je me figure que je n’ai