Page:Sand - Pierre qui roule.djvu/249

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

tourna le dos en levant les épaules quand je voulus l’embrasser aussi.

— C’est donc que j’ai fait quelque mauvaise action ? lui dis-je ; vous ne m’estimez plus ?

— Tu en as menti, répliqua-t-il de son ton le plus méprisant. Je suis assez crétin pour t’aimer ; mais tu es un pourceau de nous quitter au moment où l’on s’attache à toi ! Voilà les jeunes gens ! toujours ingrats !

— Je ne suis pas Léonce, lui dis-je en l’embrassant malgré lui, et, si je lui ressemble jamais, je vous permets de me mépriser.

Quant à Impéria, elle me parut beaucoup plus occupée d’un nouveau rôle qu’elle étudiait que de mon départ, et j’en fus si douloureusement blessé, que je résolus de partir sans aller lui dire adieu. Elle était au théâtre avec Anna, répétant une scène avec acharnement ; mais, au moment où je montais en diligence, je la vis accourir tout essoufflée avec sa compagne. Elles m’apportaient un joli souvenir qu’elles avaient brodé pour moi dans les coulisses pendant les répétitions, et Impéria me fit ses adieux avec un sourire mouillé de larmes qui me remit en sa possession corps et âme.