Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/307

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sions et des fantaisies, des qualités et des travers de son peuple.

Ce besoin de personnifier les divers instincts naïfs ou faussés de l’être humain dans des types qui se sont appelés Arlequin, Polichinelle, Cassandre, le Capitan, Pierrot, etc., est donc devenu commun aux deux nations à une certaine époque, à ce point qu’on a pu dire et qu’on a dit : « la comédie italienne-française ». Mais nous ne devons jamais oublier que la priorité de ce calque ingénieux et piquant de la nature appartient à l’Italie, et que, sans ce riche et curieux précédent, Molière n’eût pas créé la véritable comédie française.

C’est que la commedia dell’ arte n’est pas seulement l’étude du grostesque et du facétieux. Ce n’est pas seulement non plus l’école des grâces et des gentillesses populaires représentées par certains types aimables ; c’est surtout l’étude des caractères réels, poursuivie depuis l’antiquité la plus reculée jusqu’à nos jours, par une tradition ininterrompue de fantaisies humoristiques, très-sérieuses au fond, et l’on pourrait dire même très-mélancoliques, comme tout ce qui met à nu les misères de l’homme moral. Il semble que Démocrite n’ait ri que pour justifier les pleurs d’Héraclite.

Il y a donc toujours eu enseignement de mœurs dans toute représentation scénique, tragédie ou atellane, œuvre littéraire ou farce de tréteaux. On peut même croire que la forme la plus efficace a dû être la forme la plus populaire, celle qui, appelant toutes les classes par la franchise de sa gaieté et la simplicité de ses données, a signalé de la manière la plus saisissante à la risée publique, les travers de tous les âges de la vie et de toutes les conditions sociales.

Tout en s’aidant des excellentes recherches de ses