Page:Sand - Questions d’art et de littérature, 1878.djvu/384

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Ici l’attention est facile, le livre est extrêmement bien fait. Toute la moitié du premier volume est consacrée au résumé de la situation où César doit apparaître. C’est l’histoire de la république rapidement esquissée et très-suffisamment appréciée. Les faits nombreux de cette période, l’action multiple de Rome sur les colonies, le but et l’effet de ses conquêtes, la portée de ses alliances, l’esprit graduellement modifié de ses institutions, les causes de sa décadence morale, la réaction fatale du monde extérieur sur cette cité modèle, tout cela est merveilleusement clair et sobre, rapide et plein. C’est sans doute le résultat d’un très-grand travail, mais nulle part on ne sent l’effort ni la confusion. Cela semble venu tout d’une haleine sur les lèvres d’un penseur érudit qui résume l’œuvre de tous les anciens historiens avec tant de facilité qu’on pourrait croire les entendre se résumer eux-mêmes. Les jugements personnels sont très-courts, mais d’une formule excellente, et si la couleur en est sobre, le dessin n’en est que plus ferme et la portée plus franche. Il en faudrait citer plusieurs, car jamais personne n’a mieux dit.

La seconde partie du premier volume, consacrée au récit des quarante premières années de la vie de César, nous plaît moins. Elle n’est ni moins bien faite ni moins bien dite. Mais elle entre dans le développement d’une théorie historique que, jusqu’ici, nous trouvons trop sévèrement enchaînée à la logique du fait. César y est représenté comme ayant toujours agi aussi bien qu’il était possible d’agir, les circonstances données. Ce n’est pas là notre croyance ; nous estimons qu’il a été aussi habile que possible, son tempérament étant donné, et ce tempérament laissant beaucoup à désirer