Page:Sand - Theatre complet 2.djvu/115

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LE DOCTEUR.

Pourquoi cela ?

PÉDROLINO.

Parce que vous faites bien tout ce que vous faites, et c’est tout justement comme moi.

LE DOCTEUR, riant.

Tu es un drôle de corps ! (Se fâchant.) Mais je te défends d’être amoureux ; les gens amoureux ne sont plus bons à rien.

PÉDROLINO, pleurant.

Voyez un peu si ça n’est pas mortifiant ! Qu’est-ce que Violette va faire quand je lui dirai qu’on me défend d’être amoureux !

LE DOCTEUR.

Eh ! qu’est-ce que Violette ?

PÉDROLINO.

Ah ! si vous la connaissiez !… une jolie âme, bonne et sage comme votre femme, monsieur.

LE DOCTEUR.

Encore !… Je n’ai jamais été marié, benêt !

PÉDROLINO.

Mais vous auriez pu l’être, et, comme vous n’êtes point sot, vous auriez bien choisi… Et moi, je suis tout comme vous.

LE DOCTEUR.

Va au diable, avec tes suppositions ! Je crois qu’avec son air simple, il se moque de moi !… Allons, va ratisser mes allées, et surtout ne palisse plus mes buis en forme de croix. Il semble qu’on soit dans un cimetière.

PÉDROLINO.

Oh ! il n’y a pas de risque ; depuis que l’amour m’a échancré le cœur, je les palisse tous en forme de cœur enflammé.

LE DOCTEUR.

Eh bien, voilà qui est fort raisonnable ! dans le jardin d’un homme de mon âge et de ma profession, des emblèmes de guinguette !… Cet innocent-là me fera mettre en colère… Va-t’en ! va-t’en ! je ne veux point m’emporter, je ne suis pas venu ici pour cela… Va-t’en, te dis-je !