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LE PRESSOIR


DRAME EN TROIS ACTES


Gymnase — Dramatique. — 13 septembre 1853.


À M. LEMOINE-MONTIGNY


DIRECTEUR DU GYMNASE

(Lettre d’envoi du manuscrit du Pressoir.)


· · · · · · · · · · · · · · · J’avais essayé de mettre des paysans sur la scène, j’ai voulu essayer d’y mettre des villageois. Ce n’est pas la même chose, bien que la distinction ne frappe pas au premier abord.

Les villageois ne sont qu’à moitié paysans, les paysans ne sont pas du tout villageois. Il n’y a de vraiment rustiques que les groupes ou les familles isolés dans les fermes, dans les moulins, dans les chaumières. Plus la vie se concentre dans un milieu borné, plus l’idée se simplifie. Le vrai paysan est bien plus aux prises avec la nature qu’avec la société. Il a peu de pensées, mais elles sont tenaces ; peu de volontés, mais elles sont fortes.

Les villageois sont plus instruits. Ils ont des écoles, des industries qui étendent leurs relations. Ils ont des rapports et des causeries journalières avec le curé, le magistral local, le médecin, le marchand, le militaire en retraite, que sais-je ? tout un petit monde qui a vu un peu plus loin que l’horizon natal. Certains ouvriers, d’ailleurs, ont, avant comme depuis la Révolution, fait quelque tour de France qui est un voyage