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LES VACANCES
DE PANDOLPHE



COMÉDIE EN TROIS ACTES


Gymnase-Dramatique. — 3 mars 1852.




Pour faire du sel blanc et fin, il faut commencer par avoir du gros sel gris. Tel est le procédé dans tous les arts. Telle est l’histoire de la comédie en France.

Le théâtre italien importé chez nous y a donné naissance à la comédie française ; tout le monde le sait ; on doit donc s’étonner de cette question faite à l’auteur par la critique : « À quoi bon le théâtre italien ? »

Qui s’empara de l’école italienne pour créer une école française ? Qui fit, d’une main vigoureuse, cette brusque et merveilleuse transformation ? — Ce fut Molière : Molière, nourri à l’école des improvisateurs italiens ; Molière, auditeur assidu et admirateur fidèle de Scaramouche et de sa troupe ; Molière, expérimentateur nomade de cette manière d’improviser sur des canevas ; Molière, jouant alternativement sur le même théâtre avec la troupe italienne, et voyant, jusqu’en ses plus beaux jours, ses pièces délaissées pour les leurs ; Molière, assistant à leurs représentations avec la persévérance et l’absence de jalousie qui caractérisent la puissance, laquelle songe à profiter, au lieu de songer à nuire : Molière, cherchant sans cesse à retremper sa verve dans celle de ses rivaux, quittant, choisissant, éliminant et saisissant enfin la moelle de leur genre, pour laisser la peau et les os au vulgaire.