Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/19

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protection qui nous assure l’impunité. Songez à cela, que diable ! frère Jean.

JEAN.

Je songe à quelque chose de mieux. Je songe à faire d’une pierre deux coups ! Si mon plan réussit, un jour ou l’autre, je me débarrasse de deux innocences qui me gênent ; de ces deux vertus, je fais un petit crime pour mon neveu Bernard, une grosse honte pour ma cousine Edmée… Voyons ! je suppose que notre maquignon Francy, qui est un homme de génie, fasse acheter à M. Hubert, pour sa fille, notre gentil cheval Astaroth !

ANTOINE.

Ah !

JEAN.

Eh bien, c’est fait. L’animal sent son ancien gîte de loin, et, un beau soir… un soir d’orage… sur la fin d’une chasse, peut-être avec un peu d’aide… Laurent aux aguets… l’amazone arrive ici. On lui ménage une entrevue avec Bernard ; il a coutume de faire le difficile ; mais on la dit fort belle, et, avec la jeunesse, il faut toujours compter sur le diable.

ANTOINE.

J’entends. Mais après ?

JEAN.

Après, on la reconduit poliment chez son père, avec force regrets de l’aventure et beaucoup de blâme pour le coupable.

LÉONARD.

Alors, on les marie ?

JEAN.

Pourquoi non ? Ma moralité s’en réjouit.

ANTOINE.

Nous n’y gagnons rien !

JEAN.

Si fait, mes colombes ! Nos précautions seraient prises d’avance. La demoiselle ne sortirait pas d’ici à l’aube du jour.