Page:Sand - Theatre complet 3.djvu/70

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BERNARD.

Je ne vous crois pas.

EDMÉE.

Bernard, ne comprendrez-vous jamais que vos habitudes de méfiance ont quelque chose de blessant et de farouche, qui offense une personne fière et loyale ?

BERNARD.

Mais que diable voulez-vous que je pense quand vous refusez de le renvoyer ? Quelles raisons avez-vous de me condamner à étouffer de rage devant cet homme-là ?

EDMÉE.

Combien de fois faudra-t-il vous le dire ? Mon père l’estime et lui avait donné sa parole. J’avais demandé quelques mois de réflexion. Je ne puis me prononcer si brusquement et sans avoir eu, en effet, l’air de réfléchir.

BERNARD.

Pourquoi donc ça ?

EDMÉE.

Parce que mon père a bien assez souffert des Mauprat, Bernard, sans que je lui dise où je vous ai connu et quelles raisons me font refuser le mari qu’il m’avait choisi !

BERNARD.

Ah ! vous le regrettez bien ! Je vous dis que vous l’aimez ! Eh bien, moi, je vous contraindrai à le chasser ou je le chasserai moi-même… ou je le forcerai à se battre… et je vous réponds qu’il ne sortira pas vivant de mes mains ! Après ça, il faudra bien que vous fassiez attention à moi…

EDMÉE, qui peu à peu est devenue nerveuse et impatiente.

Ah !… assez, Bernard ! vrai ! j’ai assez de vos menaces et de ce ton impérieux et brutal contre lequel ma dignité se révolte malgré moi ! Je ne puis m’habituer à de telles manières ; ma patience, à moi aussi, n’est pas à toute épreuve ! Tenez, pensez et agissez comme il vous plaira. J’y renonce.

Elle sort.