Page:Sand - Valvèdre.djvu/322

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l’argent ! Or, son mari lui en offrait, à elle, et vous, vous en aviez, puisque j’en ai !

— Ah ! Moserwald, lui répondis-je, vous me faites bien du mal en pure perte ! Je ne pouvais pas agir comme vous pensez, et, quand je l’aurais pu, ne voyez-vous pas qu’il est trop tard ?

— Non, peut-être que non ! Qui sait ? je lui apporte peut-être la vie, moi, le gros juif si prosaïque ! Avant-hier, je l’ai cru au moment d’expirer sous mes yeux ; aujourd’hui, elle m’apparaît comme ressuscitée. Qu’elle se soutienne encore ainsi quelques jours, et nous l’emmenons, nous l’entourons de douceurs et d’amusements. J’y dépenserai des millions s’il le faut, mais nous la sauverons !

En ce moment, Bianca vint m’appeler en criant que sa maîtresse était morte. Nous nous précipitâmes dans sa chambre. Elle respirait, mais elle était livide, immobile et sans connaissance.

J’avais pour elle le meilleur médecin du pays. Il l’avait abandonnée en ce sens qu’il n’ordonnait plus que des choses insignifiantes ; mais il venait la voir tous les jours, et il arriva au moment où je l’envoyais chercher.

— Est-ce la fin ? lui dit tout bas Moserwald.

— Eh ! qui sait ? répondit-il en levant les épaules avec chagrin.

— Quoi ! m’écriai-je, vous ne pouvez pas la ranimer ? Elle va mourir ainsi, sans nous voir, sans nous reconnaître, sans recevoir nos adieux ?