Page:Sand - Valvèdre.djvu/83

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que l’on vous a vendu là une pierre d’un très-grand prix ?

— Comment ? Quoi ? Est-ce possible ? dit-elle en reprenant la bague et en la regardant. Est-ce que vous avez des connaissances dans cette partie-là ?

— J’ai pour toute connaissance M. Moserwald, ici présent, qui, pas plus tard qu’avant-hier, m’a montré une bague toute pareille, avec des brillants comme ceux-ci, et qui me l’a offerte pour douze mille francs, c’est-à-dire pour rien, selon lui, car elle vaut beaucoup plus.

Devant cette interpellation directe, la figure de Moserwald se décomposa, et le rapide coup d’œil d’Alida, allant de lui à moi, acheva de le bouleverser.

Madame de Valvèdre ne se troubla pas. Elle garda quelques instants le silence, comme si elle eût voulu résoudre un problème intérieur ; puis, me présentant la bague :

— Qu’elle ait ou non de la valeur, dit-elle, je la trouve décidément fort laide. Voulez-vous me faire le plaisir de la jeter par la fenêtre ?

— Vraiment ? par la fenêtre ? s’écria Moserwald incapable de maîtriser son émotion.

— Vous voyez bien, lui répondit Alida, que c’est une chose qui a été perdue, trouvée par votre coreligionnaire de Varallo, et vendue sans qu’il en ait connu la valeur. Eh bien, il faut rendre cette chose à sa destinée, qui est d’être ramassée dans la boue par les personnes qui ne craignent pas de se salir les mains.