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Chapitre VII

L’agglutination

§ 1.

Définition.

A côté de l’analogie, dont nous venons de marquer l’importance, un autre facteur intervient dans la production d’unités nouvelles : c’est l’agglutination.

Aucun autre mode de formation n’entre sérieusement en ligne de compte : le cas des onomatopées (voir p. 101) et celui des mots forgés de toutes pièces par un individu sans intervention de l’analogie (par exemple gaz), voire même celui de l’étymologie populaire, n’ont qu’une importance minime ou nulle.

L’agglutination consiste en ce que deux ou plusieurs termes originairement distincts, mais qui se rencontraient fréquemment en syntagme au sein de la phrase, se soudent en une unité absolue ou difficilement analysable. Tel est le processus agglutinatif : processus, disons-nous, et non procédé, car ce dernier mot implique une volonté, une intention, et l’absence de volonté est justement un caractère essentiel de l’agglutination.

Voici quelques exemples. En français on a dit d’abord ce ci en deux mots, et plus tard ceci : mot nouveau, bien que sa matière et ses éléments constitutifs n’aient pas changé. Comparez encore : franç. tous jourstoujours, au jour d’ huiaujourd’hui, dès jàdéjà, vert jusverjus. L’agglutination peut aussi souder les sous-unités