Page:Savignon - Filles de la pluie.djvu/4

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allées de sa nef ajourée, le temps avait fait croître un tapis de gazon.

Sous le porche, on entrouvrit une grille et trois adolescentes sortirent à pas lents, portant des cruches qu’elles allèrent emplir à la fontaine voisine. Des châles aux couleurs vives, orange, violet et carmin, couvraient leurs épaules sur lesquelles tombaient en masse leurs cheveux flottants.

L’une d’elles était surprenante de beauté. Avec ses compagnes, elle s’aperçut de notre émoi. Toutes trois sourirent, sans effronterie, mais avec cette simplicité idéale qui, souvent, peut passer pour de la provocation. Elles reflétaient dans leurs yeux sombres le morne orgueil d’une race à demi disparue. Sans doute eût-on pu retrouver, dans l’ébène de leur crinière, dans l’ovale de leur visage, dans la matité de leurs joues, quelque chose de la grâce italienne.

Nous nous tenions à l’écart.

Alors, un contre-maître qui surveillait les ouvriers répondit à notre question :

— Des Ouessantines.

Et il cracha sur le sol en signe d’aversion.

— Allez chez elles… Elles vous suivront sur le bord du chemin, pour peu que vous les appe-