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DISCOURS PRÉLIMINAIRE.

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Une science ne fait de véritables progrès que lorsqu’on est parvenu à bien déterminer le champ où peuvent s’étendre ses recherches et l’objet qu’elles doivent se proposer ; autrement on saisit çà et là un petit nombre de vérités sans en connaître la liaison, et beaucoup d’erreurs sans en pouvoir découvrir la fausseté.

On a long-temps confondu la Politique proprement dite, la science de l’organisation des sociétés, avec l’Économie politique, qui enseigne comment se forment, se distribuent et se consomment les richesses qui satisfont aux besoins des sociétés. Cependant les richesses sont essentiellement indépendantes de l’organisation politique. Sous toutes les formes de gouvernement, un état peut prospérer, s’il est bien administré. On a vu des nations s’enrichir sous des monarques absolus : on en a vu se ruiner sous des conseils populaires. Si la liberté politique est plus favorable au développement des richesses, c’est indirectement, de même qu’elle est plus favorable à l’instruction.

En confondant dans les mêmes recherches les principes qui constituent un bon gouvernement, et ceux sur lesquels se fonde l’accroissement des richesses, soit publiques, soit privées, il n’est pas étonnant qu’on ait embrouillé bien des idées au lieu de les éclaircir. C’est le reproche qu’on peut faire à Steuart, qui a intitulé son premier chapitre : Du gouvernement du genre humain ; c’est le reproche qu’on peut faire aux économistes du dix-huitième siècle, dans presque tous leurs écrits, et à J. J. Rousseau dans l’Encyclopédie (art. Économie politique).

Il me semble que depuis Adam Smith on a constamment dis-