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Page:Say - Traité d’économie politique.djvu/77

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LIVRE PREMIER. — CHAPITRE V.

nous avons vu que ces trois élémens de la production sont indispensables pour qu’il y ait des produits créés ; mais pour cela, il n’est point nécessaire qu’ils appartiennent à la même personne.

Une personne industrieuse peut prêter son industrie à celle qui ne possède qu’un capital et un fonds de terre.

Le possesseur d’un capital peut le prêter à une personne qui n’a qu’un fonds de terre et de l’industrie.

Le propriétaire d’un fonds de terre peut le prêter à la personne qui ne possède que de l’industrie et un capital.

Soit qu’on prête de l’industrie, un capital ou un fonds de terre, ces choses concourant à créer une valeur, leur usage a une valeur aussi, et se paie pour l’ordinaire.

Le paiement d’une industrie prêtée se nomme un salaire.

Le paiement d’un capital prêté se nomme un intérêt.

Le paiement d’un fonds de terre prêté se nomme un fermage ou un loyer.

Le fonds, le capital et l’industrie se trouvent quelquefois réunis dans les mêmes mains. Un homme qui cultive à ses propres frais le jardin qui lui appartient, possède le fonds, le capital et l’industrie. Il fait, lui seul, le bénéfice du propriétaire, du capitaliste et de l’homme industrieux. Le remouleur, qui exerce une industrie pour laquelle il ne faut point de fonds de terre, porte sur son dos tout son capital, et toute son industrie au bout de ses doigts : il est à la fois entrepreneur, capitaliste et ouvrier.

Il est rare qu’il y ait des entrepreneurs si pauvres qu’ils ne possèdent pas en propre une portion au moins de leur capital. L’ouvrier lui-même en fournit presque toujours une partie : le maçon ne marche point sans sa truelle ; le garçon tailleur se présente muni de son dé et de ses aiguilles : tous sont vêtus, plus ou moins bien ; leur salaire doit suffire, à la vérité, à l’entretien constant de leur habit ; mais enfin ils en font l’avance.

Lorsque le fonds n’est la propriété de personne, comme certaines carrières d’où l’on tire des pierres, comme les rivières, les mers, où l’industrie va chercher du poisson, des perles, du corail, etc., alors on peut obtenir des produits avec de l’industrie et des capitaux seulement.

L’industrie et le capital suffisent également, lorsque l’industrie s’exerce sur des produits d’un fonds étranger, et qu’on peut se procurer avec des capitaux seuls ; comme lorsqu’elle fabrique chez nous des étoffes de