Page:Sayous - Jésus-Christ d’après Mahomet.djvu/71

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Ou bien encore s’agirait-il de l’inspiration prophétique, interprétation qu’autorisent les théologiens musulmans, en appelant Moïse aussi la Parole de Dieu ? Tout cela est possible, mais un sens plus élevé semble se proposer, si non même s’imposer, le sens de λόγος. Non pas que Mahomet ait connu ni le premier verset de Saint-Jean ni la théologie qui le développe, mais cette notion répandue à l’état vague et traditionnel dans la sémi-chrétienne Arabie a très-bien pu se condenser de nouveau dans l’esprit du Prophète et dans le texte du Coran[1]. Seulement il n’a jamais pu y prendre la valeur hypostatique attachée par les chrétiens à ce terme auguste et profond.

Des chrétiens, remarquons-le tout de suite, il est vrai les chrétiens plus ou moins embrouillés de l’Abyssinie, ont été trompés par le vague peut-être intentionnel de ces expressions, lesquelles remontent aux premières années des prédications de Mahomet, et à ce que Sprenger appelle la période de l’influence chrétienne. Les premières persécutions des Koréischites contre l’Islam ayant déterminé la fuite du petit troupeau des disciples, l’Abyssinie chrétienne fut naturellement choisie comme refuge. Amr et Abdallah vinrent au nom de la tribu gardienne de la Kaaba demander au Négus de livrer ces émigrés[2]. Les musulmans furent appelés à la cour, et le prince leur hôte leur demanda quelle était donc cette nouvelle religion. Alors Djafar fils d’Abou-Taleb récita les passages du Coran sur Zacharie et sur la naissance de Jean-Baptiste. Des larmes

  1. La traduction arabe de la Bible, qui du reste ne remonte probablement pas au septième siècle, traduit le λόγος de Jean I, 1 par Kelim.
  2. Caussin de Perceval, T. I, p. 392 s.