Page:Scarron - Le Virgile travesti, 1889.djvu/57

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 leurs efforts,
Et gagnâmes enfin ces bords ;
Voyant votre nouvelle ville,
Nous crûmes tous voir un asile ;
Mais quelle inhospitalité,
Quelle rage ou brutalité
Règne en cette maudite terre !
Quel malheureux esprit de guerre
Possède celui de vos gens !
Ils sont pires que des sergents.
Au sortir de ce grand orage
Nous nous contentions du rivage
De peur de vous importuner,
Afin de nous démariner,
Remplir d’eau nouvelle nos pipes,
Et sécher au soleil nos nippes ;
Ils nous ont donné mille coups,
Tiré flèches, jeté cailloux,
Nous ont bafoués, fait la nique,
Nous ont dit en langue punique
Une injure qui fait rougir
Est-ce là comme il faut agir ?
Si votre nation trop vaine
Ne craint point la puissance humaine,
Et se fiant trop en ses mains
Méprise les autres humains,
Qu’elle craigne les Dieux célestes,
Et les tonnerres, et les pestes,
Dont sur les mauvais garnements
Ils exercent leurs châtiments ;
Qu’elle songe à la récompense
Que souvent, quand moins on y pense,
Ils donnent aux cœurs généreux
Qui soulagent les malheureux.
Nous sommes serviteurs d’un maître
Aussi vaillant que l’on puisse être,
Un vrai Dieu Mars en bataillant,
Mais aussi juste que vaillant,
De plus, aussi pieux que juste,
Laborieux, adroit, robuste.