Page:Schelling - Jugement sur la philosophie de M. Cousin, 1835, trad. Willm.djvu/21

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s’est nationalisée, plus aussi elle a cessé d’être intelligible pour tous les esprits cultivés. L’Angleterre et l’Écosse ignorant la France et l’Allemagne, la France ne voyant guère dans Kant[1] et Fichte que des rêveurs, amis de l’obscurité ; l’Allemagne enfin refusant à tous les autres peuples le génie philosophique : tel est le spectacle qu’offraient naguères les nations les plus avancées de l’Europe. Jamais on n’a été plus loin de s’entendre, et jamais il n’y a eu moins une philosophie européenne.

Ne nous plaignons pas cependant que les nations se soient ainsi isolées pendant quelque temps, et que, se livrant sans réserve à la pente naturelle qui les entraînait, elles aient suivi jusqu’au bout la direction dans laquelle les a poussées leur génie.

Les nations ont leur individualité, leur esprit

  1. Une preuve de l’ignorance où l’on était en France dans ces derniers temps encore sur Kant, sont, entre autres, les articles idéalisme et réalistes dans le Dictionnaire, excellent d’ailleurs, de MM. Noël et Chapsal. Sous le premier on lit : Système de ceux qui, Comme Kant, adoptent les idées innées ; et sous le second : Ceux qui, d’après Kant, regardent les êtres abstraits comme des êtres réels.