Page:Schwob - Cœur double, Ollendorff, 1891.djvu/299

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

ronds, surmontés d’une boule brillante, avec au-dessous une tache pâle.

Ceci est dans un rectangle de barrières où s’appuient des rangées d’hommes ; et, près de la machine, des ombres s’agitent. Deux fourgons étranges, percés d’œil-de-bœuf et de fenêtres carrées, l’un contre l’autre en travers ; l’un a voituré le couperet, l’autre va voiturer l’homme. Puis des bras dressés, les points rouges des cigares, des collets de fourrure éparpillés çà et là. Tout est plongé dans une nuit humide.

Tombant du ciel, une lumière grise s’étend graduellement, dessine une ligne de faite aux toits, des figures blêmes aux gens, découpe les barrières, enlève les gendarmes collés à leurs chevaux comme des ombres, pétrit le relief des fourgons, creuse les enfoncées des portes, fabrique avec les piliers de cuivre des rainures larges, avec la tache pâle un outil triangulaire luisant coiffé d’un bloc sombre piqué de trois points blancs, avec la boule brillante une poulie d’où tombe une corde, crée autour de cela des montants sanguinolents, montre près de terre une planche oblique et deux demi-lunes écartées. Les gendarmes montent à cheval. Les sergents de ville se tassent. On voit errer les pompons rouges des gardes municipaux.

« Sabre… main ! » Les rayons blancs jaillissent d’un cliquetis de fourreaux, la porte tourne sur ses gonds, et l’homme apparaît, livide, entre deux taches noires. Chauve, le crâne poli, la face rasée, les coins de la