Page:Schwob - La Lampe de Psyché, 1906.djvu/189

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chasse, soulevaient lourdement leurs élytres dans le seau du puits. Ils avaient raviné le sable des allées, à force d’y faire passer des armées, avec des bâtons de parade. Maintenant, ils venaient de donner l’assaut à un tertre herbu de la prairie. Le soleil couchant les enveloppait d’une glorieuse lumière.

Ils s’établirent sur les positions conquises, un peu las, et admirèrent les lointaines brumes cramoisies de l’automne.

— Si j’étais Robinson, dit-il, et toi Vendredi, et s’il y avait une grande plage en bas, nous irions chercher des pieds de cannibales dans le sable.

Elle réfléchit et demanda :

— Est-ce que Robinson battait Vendredi pour se faire obéir ?

— Je ne me rappelle plus, dit-il ; mais ils ont battu les vilains vieux Espagnols, et les sauvages du pays de Vendredi.

— Je n’aime pas ces histoires, dit-elle : ce sont des jeux de garçon. Il va faire nuit. Si nous jouions à des contes : nous aurions peur pour de vrai.