Page:Science et foi.djvu/12

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c’est une vérité incontestable. Mais que le monde moderne n’ait pas su l’exploiter, l’assertion me paraît téméraire. Dans cette branche d’industrie, le monde moderne a fait preuve d’une écrasante supériorité sur le monde ancien qui, déjà, cependant, soyons justes, entendait fort bien l’article. Demandez plutôt à Saint-Jérôme. En somme, jamais industrie n’a été mieux organisée, ni plus constamment florissante. Le Père Gratry est trop modeste. Je lui reprocherai le même défaut dans les lignes qui suivent :

« Le progrès de la médecine se fera, quand de grands hommes ardemment chrétiens invoqueront Jésus-Christ et diront : faisons passer l’étincelle divine à travers ce monceau de matière scientifique. »

Il me semble que le grand homme demandé se révèle avec assez d’éclat dans la personne du Révérend père. On ne peut méconnaître ni son signalement, ni les preuves de sa mission. Il est « ardemment chrétien », sauf ses propos incongrus sur l’absurdité de l’Évangile et il opère des guérisons instantanées. Certes, voilà un progrès plus qu’honnête et de bien difficiles se contenteraient à moins.

Mais le Révérend, qui a repris la clientèle et la méthode de Jésus-Christ s’estime en défaut sur un point du programme. « Il n’a pas encore ressuscité les morts ». Est-ce bien sûr ? J’ai quelque peine à le croire. Il a dû « faire passer l’étincelle divine » milliardement supérieure à l’étincelle électrique (qu’on me pardonne ce trop insuffisant néologisme, la langue demeure impuissante devant de telles sublimités). Un mort traversé par « l’étincelle divine » doit rebondir sur ses pieds comme un cabri.

C’est ainsi que triomphe la sainte mixture de la Foi et de la Science. Elle s’opère par l’infusion de Jésus-Christ dans la médecine. Aujourd’hui, entre le médecin de l’âme et celui du corps, il n’y a pas seulement différence de personnes et de fonctions, mais incompatibilité radicale et guerre civile. Quand l’un arrive, l’autre se sauve. Cruel martyre pour le pauvre patient coupé en deux comme l’enfant de Salomon, moitié au docteur, moitié au curé ! L’illustre restaurateur de la méthode nazaréenne est venu mettre fin à ce schisme et rétablir l’unité du physique et du moral par l’amalgame complet des thérapeutiques. Prêtre et praticien désormais ne feront qu’un.

Rien de plus normal. Toutes les maladies, d’après le sys-