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IVANHOÉ

VIII

Au milieu de la cavalcade, le prince Jean s’arrêta subitement, et, appelant près de lui le prieur de Jorvaulx, il déclara que la grande affaire du jour avait été oubliée.

— Nous avons négligé, messire prieur, de nommer la belle reine de l’amour et de la beauté, qui doit distribuer la palme avec sa blanche main. Quant à moi, je suis tolérant dans mes idées, et je veux bien donner ma voix à Rébecca aux yeux noirs.

— Sainte Vierge ! répondit le prieur levant les yeux avec horreur, une juive ! nous mériterions d’être lapidés et chassés de la lice, et je ne suis pas encore assez vieux pour faire de moi un martyr ; en outre, je jure par mon saint patron que ses charmes sont bien inférieurs à ceux de la belle Saxonne Rowena.

— Saxon ou juif, répondit le prince, chien ou porc, peu m’importe ! Nommez Rébecca, vous dis-je, ne fût-ce que pour mortifier ces manants saxons.

Mais, à ces mots, un murmure s’éleva, même parmi son propre entourage.

— Ceci dépasse la plaisanterie, monseigneur, dit de Bracy ; aucun chevalier ici ne mettra sa lance en arrêt si l’on tente une pareille insulte.

— C’est une insulte sans nécessité, dit Waldemar Fitzurze, un des plus vieux et des plus puissants seigneurs de la suite de Jean ; et, si Votre Grâce osait la tenter, elle serait sûre de ruiner ses projets.

— Je vous ai pris à mon service, messire, dit Jean, arrêtant brusquement son coursier, pour être mon serviteur et non mon conseiller.