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IVANHOÉ.

lade composée par un Saxon que j’ai connu en Terre sainte.

Il fut bientôt aisé de voir que, si le chevalier n’était pas un maître accompli dans l’art du ménestrel, son goût avait du moins été développé sous d’excellents professeurs ; l’art lui avait du moins appris à adoucir les défauts d’une voix qui n’avait qu’une gamme peu étendue, et qui était naturellement plutôt rude que douce. Bref, il avait fait tout ce que l’éducation pouvait faire pour suppléer à ses défectuosités naturelles. Son exécution aurait donc pu passer pour tout à fait respectable, auprès même d’un meilleur juge que l’ermite, surtout quand le chevalier introduisait dans ses modulations, tantôt des notes vives, tantôt des notes mélancoliques, qui donnaient de la force et de l’énergie aux vers qu’il chantait.


Le champion arriva de Palestine
Ayant accompli des hauts faits chevaleresques,
Portant sur ses épaules la croix
Que les combats et les tempêtes avaient fanée ;
Chaque bosselure du bouclier battu
Était la preuve d’une bataille livrée ;
Et ainsi sous le balcon de sa dame
Il chanta comme le crépuscule tombait :

« Joie à ma belle ! Regarde ton chevalier
Qui est revenu de la terre dorée lointaine ;
Il n’apporte pas de richesses, il n’en a pas besoin ;
Sauf ses bonnes armes et son cheval de guerre,
Ses éperons pour charger l’ennemi,
Sa lance et son épieu pour le coucher à terre :
Tels sont les trophées de ses peines,
Et l’espoir d’un sourire de Tecka.

Joie à ma belle ! dont le chevalier constant
A été stimulé aux actes de prouesse, par sa faveur ;
Elle ne restera pas inconnue
Où se rencontre le cortège des brillants et des nobles. »
Le ménestrel chanteur et les hérauts diront :
Observez cette jeune fille de beauté qui est là-bas.