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IVANHOÉ.

hors de la portée de la main du prisonnier. Ces ouvertures n’admettaient, même à midi, qu’un jour faible et incertain, qui était remplacé par une obscurité complète bien avant que le château eût perdu le bienfait du soleil.

Des chaînes et des fers qui avaient servi à des captifs précédents, dont on avait redouté les efforts actifs pour s’échapper, étaient suspendus, rouillés et inoccupés, aux murs de la prison, et dans le cercle d’un de ces carcans de fer, il restait encore deux os poudreux qui paraissaient avoir appartenu autrefois à une jambe humaine, comme si le prisonnier, après y avoir péri, avait, toujours enchaîné, passé à l’état de squelette.

À une extrémité de ce réduit horrible était un grand gril, au-dessus duquel on voyait plusieurs barres de fer croisées que la rouille avait à moitié rongées. Toute l’apparence de ce cachot aurait pu épouvanter un cœur plus ferme que celui d’Isaac, qui, néanmoins, se trouva plus calme sous la pression d’un danger imminent, qu’il n’avait paru l’être lorsqu’il était affecté par des terreurs dont la cause était encore éloignée et incertaine.

Les amateurs de la chasse prétendent que le lièvre est en proie à une agonie plus terrible pendant la poursuite des lévriers que lorsqu’il se débat entre leurs griffes[1]. Il est donc probable que les juifs, par suite de leurs craintes fréquentes en toute occasion, avaient l’esprit en quelque sorte préparé à tous les actes de tyrannie qu’on pouvait leur infliger ; si bien qu’aucune agression, une fois qu’elle était accomplie, ne pouvait amener chez eux cette surprise qui, de toutes les propriétés de la terreur, est celle qui anéantit le plus. Ce n’était, d’ailleurs, pas la première fois qu’Isaac se trouvait dans une situation aussi périlleuse. Il avait donc l’expérience pour le guider, et il pouvait espérer

  1. Nous ne garantissons nullement l’exactitude de ce trait d’histoire naturelle, que nous rapportons sur l’autorité du manuscrit Wardour. W. S.