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IVANHOÉ.

pardonnez aux scrupules du vaillant de Bracy ; j’espère que bientôt il les aura surmontés.

— Ceci est au-dessus de votre éloquence, Fitzurze, répondit le chevalier.

— Mon bon Maurice, ajouta le rusé politique, ne te cabre pas, comme un cheval effrayé, sans examiner du moins l’objet de ta terreur. Hier encore, ton plus grand désir était de rencontrer ce Richard face à face dans la bataille. Je te l’ai entendu dire cent fois ?

— Oui, répliqua de Bracy ; mais c’était, comme tu dis, face à face, sur un champ de bataille. Tu ne m’as jamais entendu émettre la pensée de l’assaillir quand il serait seul et dans une forêt.

— Tu n’es pas un bon chevalier, si un tel scrupule t’arrête, dit Waldemar. Est-ce sur des champs de bataille que Lancelot du Lac et sir Tristam ont acquis leur renom ? Ne fut-ce pas plutôt en attaquant de gigantesques chevaliers sous l’ombrage de forêts sombres et inconnues ?

— Oui ; mais je te garantis, reprit de Bracy, que ni Tristam ni Lancelot n’eussent été de pair seul à seul avec Richard Plantagenet, et je ne crois pas que ce fût dans leurs habitudes de se mettre à la tête d’une compagnie pour aller attaquer un homme seul.

— Tu es fou, de Bracy, dit Waldemar. Que te proposons-nous donc, à toi capitaine salarié et engagé des compagnies franches, et dont l’épée est au service du prince Jean ? On te montre l’ennemi, et tu fais des objections quand la fortune de ton maître, celle de tes amis, la tienne, et la vie et l’honneur de chacun de nous sont en jeu.

— Je te dis, répondit de Bracy d’un air déterminé, qu’il m’a donné la vie. Il est vrai qu’il m’a éloigné de sa présence et qu’il a refusé mon hommage ; par conséquent, je ne lui dois ni amitié ni allégeance ; mais je ne veux pas lever la main contre lui.

— Cela n’est pas nécessaire, dit Waldemar ; envoie Louis Winkelbrand et une vingtaine de tes lances.