Page:Scott - Oeuvres de Walter Scott, trad Defauconpret, 1836.djvu/354

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t que ma fin prochaine ; si, comme le disaient les bardes mes ancêtres, cette harpe, qui résonna jadis sous les mains de saint Modan, a la vertu de prédire la destinée de son maître, j’accepte sans regret l’augure fatal au seul ménestrel.

CHANT SECOND. 351

VIII.

— Mais, hélas, chère Hélène, ce fut ainsi qu’elle gémit la veille de la mort de ta pieuse mère : tels furent les sons qu’elle rendit lorsque, cherchant à répéter un lai d’amour ou de victoire, je fus épouvanté moi-même de l’entendre troubler la fête et soupirer tristement malgré moi dans le château de Bothwell, avant que les Douglas, proscrits et condamnés, fussent bannis de leur terre natale. Ah ! si quelque malheur plus cruel doit encore frapper la maison de mon seigneur, ou si ces accords plaintifs menacent la belle Hélène d’une affliction nouvelle, harpe funeste, aucun barde n’osera plus demander à tes cordes des accens de triomphe ou d’allégresse. Après un dernier chant de douleur en harmonie avec mon désespoir, tu couvriras de tes fragmens dispersés le tombeau de ton maître !

IX.

Hélène répondit, pour le consoler :

— Vénérable ami ! calme ces craintes de l’âge. Tu connais tous les chants que la harpe ou la cornemuse répètent depuis la Tweed jusqu’à la Spey : faut-il donc être surpris si parfois des sons inattendus se confondent dans ta mémoire, et mêlent l’hymne funèbre aux airs du triomphe ?

Nous n’avons guère maintenant de motif de crainte ; nous vivons ici obscurs, mais en sûreté. Mon père, grand de sa seule vertu, renonçant à ses domaines, à ses honneurs et à son rang, n’a pas plus à redouter des coups de la fortune, que ce chêne du courroux des autans. Les orages peuvent dépouiller ses rameaux de leur feuillage, mais non ébranler son tr