Page:Scott - Oeuvres de Walter Scott, trad Defauconpret, 1836.djvu/422

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nfirmes sont renversés par terre ; les timides fuient, les femmes poussent des cris d’effroi ; les plus audacieux s’arment de cailloux, de bâtons et de flèches. Les soldats du roi entourent Douglas d’un cercle de lances, et le conduisent dans le sentier qui mène au château. Ils sont assaillis par la populace, qui les poursuit de ses clameurs.

Le noble Douglas vit avec chagrin que le peuple se révoltait contre les lois ; il s’adressa à l’officier de l’escorte, et lui dit :

— Sir John de Hyndford, ce fut mon épée qui te donna l’accolade ; en souvenir de ce jour, laisse-moi parler à ces hommes égarés.

XXVIII.

— Mes amis, écoutez-moi, avant de vous montrer sujets rebelles à cause de Douglas. Je sacrifie sans regret aux lois de l’Ecosse ma vie, mon honneur et tous mes intérêts : ces lois sont-elles si faibles qu’elles aient besoin du secours de votre vaine fureur ? ou si je souffrais une injustice, serais-je assez aveuglé par un funeste égoïsme, renoncerais-je si facilement à tout sentiment de patrio-

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tisme, pour briser tous les liens d’amour qui unissent ma patrie et ma famille ! Non, non ! croyez que ce ne serait point un adoucissement pour ma captivité dans cette sombre tour, de savoir que les lances qui ne doivent être l’effroi que de nos ennemis sont teintes du sang de mes amis ; qu’un inutile combat prive les mères de leurs fils, les femmes de leurs époux, les orphelins de leurs pères, et que les bons citoyens, gémissant de l’outrage fait aux lois, maudissent Douglas comme le prétexte du désordre ! Je vous conjure de prévenir tous ces malheurs par votre patience, et de vous conserver le droit de m’aimer toujours.

XXIX.

La fureur de la foule s’éteint dans les ;armes, comme l’orage se fond en pluie ; ils lèvent les yeux et étendent les mains vers le ciel, appellent ses faveurs sur la tête de l’homme généreux qui, touché du seul intérêt de la patrie, estimait son sang bien moins que celui de l’Ecosse. Les vieillards qui avaient un pied dans la tombe bénissaient celui qui arrêtait la guerre civile, et les mères élevaient leurs enfans dans leurs bras pour leur montrer ce Chef magnanime qui triomphait de sa colère et de ses outrages, et leur conservait un père : les cœurs mêmes des soldats sont émus, ils conduisent Douglas à pas lents, les armes traînantes et la tête baissée, comme s’ils accompagnaient le cercueil d’un compagnon chéri ; ce fut en sou