Page:Scudéry - Artamène ou le Grand Cyrus, cinquième partie, 1654.djvu/11

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Mandane, vous euſſiez aſſurément tenu voſtre parole : & la guerre ceſſant, j’euſſe pû eſperer de revoir mon cher Abradate, & de le revoir meſme voſtre Amy : puis que le connoiſſant genereux comme il eſt, je ſuis aſſurée qu’il ne sçaura pas pluſtost la maniere dont vous me traittez, qu’il en ſera ſensiblement touché. Vous pouvez du moins Madame, repliqua t’il, me rendre un bon office, en attendant qu’il plaiſe à la Fortune d’eſtre laſſe de me perſecuter : Helas Seigneur, interrompit Panthée, ſeroit il bien poſſible qu’en l’eſtat où je ſuis, je puſſe faire quelque choſe qui peuſt vous reſmoigner le reſſentiment que j’ay de toute vos bontez ? Vous le pouvez ſans doute, reſpondit il, en vous donnant la peine d’eſcrire un mot au vaillant Abradate, afin de le prier d’obliger Creſus à ne maltraitter pas le Prince Artamas : & à bien traitter auſſi cous les autres Priſonniers qui ont eſté faits en cette funeſte occaſion, où la victoire luy a ſi peu couſté, & luy a eſté ſi peu glorieuſe : ne doutant nullement qu’il ne vous accorde ce que vous luy demanderez. je ne vous dis pas, Madame, que ſelon ce qu’il fera, vous ſerez plus ou moins bien traitée : au contraire, pour vous porter a eſcrire plus obligeamment, je vous declare que quand il vous refuſera, je ne perdray jamais le reſpect que je dois à voſtre condition, & à voſtre vertu : & que de mon conſentement, vous ne recevrez jamais aucun déplaiſir. Ce que vous me dittes eſt ſi genereux, repliqua t’elle, que je ſerois indigne de voſtre protection, ſi je ne faiſois pas tout ce qui eſt en ma puiſſance pour vous ſatisfaire : principalement ne me demandant que des choſes que l’equité toute ſeule devroit touſjours obtenir de moy. Apres quelques remercimens